En 1959, à l’âge de 23 ans, Claudine Monchaussé s’installe dans le village berrichon de La Borne, haut lieu de la poterie identifié dès le XIIe siècle : elle se forme en autodidacte et y poursuit depuis lors sa production. La terre est sa matière de prédilection : elle la modèle puis soumet sa sculpture au feu qui fait son œuvre. Les premières silhouettes de la sculptrice ont évolué vers des formes plus strictes nimbées d’un certain mystère, oscillant entre principes sphériques, symboles de fertilité et éléments saillants. Selon le commissaire de l’exposition Joël Riff, “chaque œuvre a sa propre adresse, une charge qui en émane et qui trouvera sa propre destination”. Le travail de Claudine Monchaussé témoigne d’une permanence, d’un dépassement continu qui tend au sacré par son universalité. Ses sculptures s’imposent d’elles-mêmes, comme une évidence.
À La Verrière, une quarantaine de pièces témoignent de cette recherche intérieure. L’artiste ne dessine pas : elle perçoit en volume la forme qu’elle façonne dans son atelier. Chaque sculpture relève ainsi du surgissement, comme l’évoque le titre de ce projet – “sourdre” signifiant littéralement “sortir de terre”. S’agissant de la deuxième exposition personnelle de la sculptrice et de sa première hors de France, ce titre se rapporte aussi au jaillissement de son œuvre sur la scène artistique : une mise en lumière importante pour la céramiste née en 1936, dont la production est longtemps restée confidentielle.
Le commissaire Joël Riff a réuni autour de Claudine Monchaussé d’autres créateurs pour nourrir la réception du public. L’artiste bruxellois Nicolas Bourthoumieux (né en 1985) présente des sculptures qui accueillent celles de son aînée. Deux grandes figures féminines de la sculpture française, Marie Talbot (1814-1874) et Germaine Richier (1902-1959), sont représentées respectivement par une pièce emblématique et une gravure. Des idoles signées par le duo mountaincutters (actif depuis 2012) rythment l’espace tandis que le sculpteur Damien Fragnon (né en 1987) signe un texte sur la nature des eaux minérales issues des profondeurs. Et chaque artiste de “sourdre” sous la lumière zénithale de La Verrière.